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La composition de la communauté

Une fois la thématique cernée, il faut ensuite se concentrer sur la composition de la communauté. Cette réflexion nécessite alors de faire le point sur les forces en présence afin d'identifier les membres actuels de l'organisation ou de l'institution qui sont le plus en mesure de contribuer au succès de la communauté. Il s'agit aussi dans cette phase d'identifier le degré de motivation à apprendre et échanger des membres potentiels.

L'endroit de localisation des membres potentiels n'a que très peu d'importance par rapport aux éléments cités ci-dessus car l'évolution actuelle des outils de communication diminue fortement les écueils liés à la dispersion géographique.

Dans son étude consacrée aux communautés de pratique, le CEFRIO identifie une série de caractéristiques structurantes liées à la composition des communautés de pratique.

Nous en reprenons l'essentiel dans ce qui suit.

Volontaires ou conscrits ? Communauté ouverte ou fermée ?

Le processus de sélection des membres d'une communauté varie d'une situation à l'autre.

Si les membres de la communauté sont identifiés et choisis en fonction de leurs compétences, leurs connaissances par rapport au domaine traité ou d'autres critères, alors, on parlera de communauté fermée.

Dans le cadre d'une ouverture de la communauté à toutes les personnes intéressées, on parlera alors de communauté ouverte.

Les communautés ouvertes peuvent voir leur composition varier amplement au fil de leur existence. On parlera alors de communautés fluides en raison du changement fréquent de ses membres. Dans le cadre de communautés fermées, on parlera aussi de communautés à effectif stable. On pourrait imaginer que l'entrée dans ces dernières citées est toujours possible mais elle serait soumise à une série de critères ce qui aurait pour effet de contrôler les entrées et donc de ne pas amener de grands changements de composition.

Si les communautés ouvertes regroupent souvent des volontaires, il est plus difficile de cerner le degré d'implication dans les communautés fermées. D'après le CEFRIO, "certaines organisations croient que les membres de ces communautés doivent eux aussi y adhérer de façon volontaire alors que d'autres croient qu'ils doivent y être obligés ou fortement encouragés". Dans certaines entreprises, la nomination de certains employés comme animateurs de communautés de pratique peut être entrevue comme une sorte de promotion ou de reconnaissance du travail de la personne choisie.

Dans l'absolu, il est néanmoins toujours plus prudent de s'assurer de la compréhension du sens de la mise en place de la communauté. Qu'ils soient volontaires ou conscrits, la réussite de la mise en place d'une communauté dépendra du degré de motivation des chacun de ses membres.

Nous pensons en ce sens que les théories et les modèles liés à la motivation sont donc aussi partie intégrante d'une bonne planification et d'une bonne gestion de communauté de pratique.

Faut-il une expérience préalable ?

Une communauté peut émerger à partir d'un réseau existant qui se formalise (Lesser et Everest, 2001 ; Mc Dermott, 1999b; cités par CEFRIO).

Cette affirmation peut nous amener à nous poser la question de la nécessité ou non, de tenir compte de l'expérience des membres potentiels d'une communauté lors de sa planification.

Même s'il est clair qu'il est toujours souhaitable d'avoir une communauté composée de personnes possédant une expérience en la matière, le critère d'expérience ne devrait pas être discriminatoire pour les membres. Par contre, s'informer des expériences de communauté ou en matière de partage et de collaboration des membres potentiels peut s'avérer souhaitable voire nécessaire. En effet, avoir une information en matière de profil des membres sur leur expérience est une donnée qui nous aidera également à mieux planifier notre communauté de pratique. Ces données nous permettront peut-être de choisir les animateurs ou personnes ressources plus facilement ou bien nous amèneront à la conclusion qu'il sera nécessaire de sensibiliser les membres à la collaboration lors des premières phases de lancement et d'évolution.

L'expérience préalable fait également appel au niveau de maîtrise technologique des participants ainsi qu'à leurs habitudes en matière de communication. Obtenir des informations par l'intermédiaire d'une enquête ou par des entretiens est également déterminant dans la planification des activités de la communauté (en prévoyant notamment un soutien en matière d'utilisation des technologies par exemple).

Le guide du CEFRIO propose, page 37 (17) , les résultats d'une étude qui estime que partir de réseaux existants n'est pas spécialement un gage de réussite.

La diversité culturelle

Les communautés que l'on met en place sont souvent composées de personnes possédant des sensibilités, des avis pouvant être différents les uns des autres dans de nombreuses dimensions.

Même s'il semblerait plus simple de lancer des communautés constituées de personnes possédant des profils identiques, la diversité est source de discussion et représente donc un facteur de développement certain.

Cette diversité culturelle peut provenir de différences nationales, professionnelles ou organisationnelles (Wenger, Mc Dermott et Snyder, 2002, cités par CEFRIO).

Une communauté composée de membres relativement semblables sur le plan culturel sera nommée "homogène" tandis qu'une communauté composée de membres culturellement éloignés sera appelée "hétérogène".

La mise en place d'un dialogue sain et l'instauration d'une confiance mutuelle (que l'on fait d'abord naître en apprenant à se connaître les uns les autres) sont des clés essentielles à la construction de communautés.

Quel est le profil du participant idéal ?

Le participant idéal doit :

-> être ouvert au changement (le contact avec des nouveaux concepts et un grand nombre d'individus différents requiert une souplesse, une ouverture d'esprit importantes).

-> Etre motivé (il faut donc qu'il comprenne le sens de la communauté dans laquelle il interagit, le sens de la collaboration et du partage - voir le modèle de dynamique motivationnelle de Viau pour les autres éléments susceptibles d'influencer cette motivation).

-> Faire preuve d'autodiscipline et d'esprit d'initiative (ces qualités assureront le dynamisme des échanges).

-> Etre intéressé par la pratique qui est abordée.

Se donner le temps

Le temps est un élément essentiel dans le fonctionnement d'une communauté. Il faut donc s'assurer que les membres bénéficient du temps nécessaire à leur participation. Cette assurance est un élément essentiel dans la planification des premières étapes du développement des communautés.

Tout organisme doit donc gérer l'agenda de ses collaborateurs de manière à ce que le temps consacré à la communauté soit prévu.

Une étude du CEFRIO (18) démontre que le manque de temps disponible peut être une source d'insatisfaction ou de frustration chez les membres d'une communauté.


(17) Partir de zéro ou d'un réseau existant ?

Que nous apprend la recherche du CEFRIO sur la croyance voulant qu'il serait préférable de démarrer une communauté à partir de réseaux déjà existants? Certaines différences significatives apparaissent entre les réponses des hommes et des femmes. Seuls 4,8 % des répondants, toutes des femmes, affirment que les autres participants étaient pour eux des connaissances avant la mise en place de la communauté de pratique virtuelle. Les hommes affirment en général que les participants étaient pour eux des collègues bien connus ou peu connus (64,7 %), sans être des amis. Seulement 37,5 % des femmes ont fait la même affirmation. Celles-ci ont davantage choisi la catégorie « Personnes pas du tout connues » (36,5 % des femmes comparativement à 22,1 % des hommes). Ce résultat est intéressant, puisque nous verrons plus loin que les femmes considèrent davantage que la communauté a été un succès, ce qui tend à infirmer certains écrits selon lesquels il serait toujours préférable de bâtir une communauté de pratique à partir d'un groupe informel de gens qui se connaissent déjà. Cette condition ne paraîtrait finalement pas déterminante dans notre étude, où seulement 20,9 % des répondants étaient des amis ou se connaissaient bien avant le lancement de la communauté.


CEFRIO (2005) - Guide de mise en place et d'animation de communautés de pratique intentionnelles, page 37.

(18) Dans la recherche du projet du CEFRIO, on a constaté que peu de participants ont bénéficié de ressources supplémentaires, y compris de dégagement de temps, dans le cadre de leur participation à la communauté. Un examen de cette question indique que, dans la majorité des cas, les participants auraient souhaité bénéficier de plus de temps pour participer activement à la communauté. Ce résultat n'est pas étonnant, puisque le temps consacré aux activités de la communauté est ressorti comme une variable d'insatisfaction importante et de préoccupation majeure chez les répondants.

CEFRIO (2005) - Guide de mise en place et d'animation de communautés de pratique intentionnelles, page 38.